La Fontaine à la Fontaine

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La Fontaine à la Fontaine

(Procès de Jean – Acte II -)

Ne jamais dire :
« Fontaine, je ne puiserai jamais dans ton Fabliau ! »

À une claire fontaine, ses eaux
Etant si belles, un noble sire,
S’il n’y prit bain,
Vint en mirer l’Ondine.
D’humeur pourtant peu badine,
Ce Fabuliste, empruntant du bassin
Le titre éponyme,
Avait eu procès par ses pairs
De tous n’en faire,
Tuant jusqu’au Père Esope, que tristes anonymes !
Qu’on le critique en son Académie
Et qu’on l’accable
À la cour pour ses Fables
C’était honneur d’en porter l’infamie
Mais du costume vert
Ce n’était point des insignes aurifères
Que les siens l’en disait faussaire
Et du fabuleux Aède le plagiaire ;
Non, qu’on le fasse Immortel
Lui qui ne s’en remettait qu’à l’Eternel
Leur était tout autant égal
Mais qu’il soit seul cité en maître,
Plus que Molière même en son art théâtral,
Là était forfaiture du dit traître…

… Se penchant à la surface de la vasque,
Pour comme Narcisse s’admirer
Ou absolution y trouver,
Du reflété et déformé masque
Qu’y vit son âme ?
Odin, à la source Mimir, y perdit oeil
En pour du secret des Germaines Oghams…
… D’avoir trop puisé en d’anciens recueils
Peut-être lui, le coeur !
Quoi qu’il en soit il n’eut plus d’ardeur
(D’être à son tour un Dieu, voilà peut-être sa peur)
À se remettre au labeur
Si ce n’est pour quelques bondieuseries
Qu’une mortelle abbatiale Phtisie
Convainquit d’en porter cilice
Pour expier pêchés et maléfices.
N’avait-il plus rien du passé
À s’inspirer pour soudain tout renier ?
Plus sûrement de ce miroir aqueux
Il n’y eu ni visages ni aveux
Si ce n’est de tous les autres par le reconnu sien
D’en porter seul le glorieux mais injuste poids du Destin !

Auteur : Val


Académie : Comprendre ici l’Académie Française.
Aède : Antique Poète de Grèce qui chantait les épopées.
Aqueux : Qui a rapport avec l’élément liquide.
Aurifère : Qui contient de l’or, ici en référence à l’habit vert et or de l’Académie Française.
Cilice : On aurait trouvé sur la dépouille de Jean de la Fontaine ce supplice consistant à se châtier les chairs par cette sorte de ceinture dans le but d’expier ses pêchés.
Esope : Le Père des Fables.
Eternel : Le nom donné à Dieu par ses croyants.
Fabliau : Petit récit aux mêmes caractéristique qu’une Fable mais plus brève.
Immortel : Le nom donné aux membres de l’Académie Française.
Mimir : (ou Mimisbrunn), outre un être éponyme de la Mythologie Germano-Scandinave, le nom abrégé d’une source de sagesse légendaire.
Molière : Le légendaire dramaturge qui n’eut pas les grâces de l’Académie étant « comédien » !
Narcisse : Outre les fleurs poussant prés de l’eau, c’est aussi l’être de la Mythologie Grecque amoureux de sa seule et propre image (Narcissique).
Odin : Le manipulateur Dieu, chef du Panthéon Germano-Scandinave… Dans le mythe il sacrifia son œil à la source Mimir pour que lui soit révélé le secret de la sagesse et la vérité.
Oghams : Alphabet symbolique Celte qui est différent des Runes des Germains mais qui sont souvent confondus, ici à dessein.
Ondine : Nymphe ou esprit des eaux dans la Mythologie Germanique.
Phtisie : L’ancien nom de la Tuberculose dont serait mort Jean de la Fontaine. Qualifiée ici d’Abbatiale pour faire un amalgame avec l’Abbé du Fabuliste qui le convainquit de renier ses écrits et de se consacrer à sa foi.
Vasque : Genre de bassin circulaire.

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(tiré de l'ouvrage édité : Le Fablier de Val)

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