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Le Lombric et le Pêcheur
Se tortillant à la vue d’un hameçon de fer
Un vif et long Ver
S’adressa à son Pêcheur
Espérant qu’il ait d’enfant encore le coeur :
« Rendez grâce au divin ;
Epargnez Sa créature, informe intestin,
La plus insignifiante et sans défense… »
« … Il est à craindre que toutes Puissances
Depuis leurs hautes sphères, sans être cynique,
Ne se penchent sur un Lombric !
Ne s’en parjurant la Taupe
Pourquoi d’un de tes segments
En serait-il autrement
Pour la Saupe ? »
Promis à une mort si futile
Le Vermisseau montra pourtant qu’il était utile :
« Vous me pensez Larve, à tort,
Mais je vaux mieux qu’une Mouche
- Dont vous feriez meilleur sort
À la mettre sur votre ligne de touche –
Car savez-vous que si le sol est fertile
Il le doit, bien avant la charrue,
À ma seule Vertu
De l’aérer, faute d’en devenir stérile… »
« … Sois loué pour cela
Mais ici servant d’appât
Ajoute-toi donc un autre don,
Celui d’être au goût de mon Poisson ! »Soudain embroché au moins notre Vertiau,
Déjà à moitié noyé sous l’eau,
Se consola en pensant à ses frères
Et à leur promis repas
Quand le rustre, un jour passant à trépas,
Serait mis alors sous terre !Pour un profit
Et quels que soient ses qualités,
S’il faut un sacrifié,
On en fera fi !
Auteur : Val
- Friture : Petits Poissons destinés à être frit pour un repas.
- Lombric : Ver de terre.
- Saupe : Petit Poisson de Méditerranée.
- Vertiau : Surnom populaire du Ver de terre.
(tiré de l'ouvrage édité : Histoires de Fables)